eJournals lendemains 39/154-155

lendemains
0170-3803
2941-0843
Narr Verlag Tübingen
Es handelt sich um einen Open-Access-Artikel der unter den Bedingungen der Lizenz CC by 4.0 veröffentlicht wurde.http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/
2014
39154-155

Le ‚beau‘ dans l’œuvre de Michel Foucault

2014
Hans-Jürgen Lüsebrink
ldm39154-1550282
282 AArts & Lettres Hans-Jürgen Lüsebrink Le ‚beau‘ dans l’œuvre de Michel Foucault De l’archéologie des pratiques artistiques à l’esthétique de l’existence A la mémoire de Michel Foucault (1926-1984) 1 I. Foucault ‚écrivant‘ - la beauté paradoxale d’une écriture-diagnostic Interroger l’œuvre de Michel Foucault sous l’angle du beau et de la beauté, c’està-dire dans la perspective d’une réflexion esthétique, peut paraître paradoxal, voire, à la rigueur, relever d’une gageure. Foucault est un historien du discours, des savoirs et des relations que ceux-ci entretiennent avec le pouvoir, qui a toujours récusé, notamment dans les multiples entretiens dans lesquels il a pu se prononcer sur l’orientation fondamentale de son œuvre et la conception de son écriture, toute dimension proprement esthétique de ses questionnements et de la manière dont il les a formulés. Dans une interview de 1968 récemment publiée durant laquelle le critique littéraire Claude Bonnefoy l’interrogeait sur la dimension esthétique de son écriture, Michel Foucault dit souscrire à la distinction entre écriture littéraire et écriture discursive, mais ne se rattache qu’à cette dernière. Bonnefoy affirme avec insistance le „talent d’écrivain“ 2 de Foucault et constate que „quand on lit l’Histoire de la folie ou Les mots et les choses, ce qui frappe, c’est de voir une pensée analytique extrêmement précise et pénétrante sous-tendue par une écriture dont les vibrations ne sont pas uniquement celles d’un philosophe mais révèlent un écrivain“ et souligne que cette dimension donne à ses textes „une ouverture sur un domaine qui n’est plus seulement celui de l’écriture discursive, mais de l’écriture littéraire“. „À vous lire“, poursuit Bonnefoy, tentant de sortir son interlocuteur de sa réserve, „on a l’impression que votre pensée est inséparable d’une formulation à la fois rigoureuse et modulée, que la pensée serait moins juste si la phrase n’avait pas trouvé aussi sa cadence, si elle n’était pas aussi portée et développée par cette cadence.“ 3 Foucault répond d’un ton plutôt laconique à cette longue question de Bonnefoy, en affirmant qu’il n’est pas, „personnellement, très fasciné par le côté sacré de l’écriture“ 4 tout en admettant que l’écriture peut avoir, chez les écrivains - il cite ici explicitement Mallarmé -, une dimension proprement esthétique et intransitive, et il concède également: „Au niveau de mon expérience vécue, j’avoue que ce n’est pas du tout comme ça que, pour moi, l’écriture s’est présentée. J’ai toujours eu à l’égard de l’écriture une méfiance presque morale.“ 5 Foucault caractérise sa propre écriture comme un „diagnostic“ 6 et la rapproche de la pratique chirurgicale qui lui était familière depuis son enfance puisque son père, lui même fils de médecin, était un chirurgien renommé à Poitiers, sa ville natale. 283 AArts & Lettres Dans cet entretien, Foucault se désigne lui-même comme un „diagnosticien“ du discours: Je ne découvre ce que j’ai à démontrer que dans le mouvement même par lequel j’écris, comme si écrire était précisément diagnostiquer ce que j’avais voulu dire au moment même où j’ai commencé à écrire. Je pense que là je suis tout à fait fidèle à mon hérédité puisque comme mon père et mes grands-parents, je veux faire un diagnostic. Seulement, à leur différence - et c’est en cela que je me sépare d’eux et que je suis retourné contre eux -, ce diagnostic je veux le faire à partir de l’écriture, je veux le faire dans cet élément du discours que les médecins, d’ordinaire, réduisent au silence. 7 Pour se démarquer très nettement de la fonction d’‚écrivain‘, avec toute la dimension esthétique et l’aura symbolique qu’elle implique et que Bonnefoy veut lui attribuer, Foucault a recours, dans d’autres passages de ce long entretien programmatique, à la distinction établie par Roland Barthes entre ‚écrivains‘ et ‚écrivants‘ pour affirmer d’emblée: Je ne suis pas un écrivain. D’abord, je n’ai aucune imagination. Je n’ai jamais pu concevoir quelque chose comme le sujet d’un roman. Certes, j’ai eu parfois l’envie d’écrire des nouvelles au sens presque journalistique du terme: de raconter des micro-événements, de raconter par exemple la vie de quelqu’un, mais en cinq lignes, en dix lignes, pas plus. Je ne suis donc pas un écrivain. Je me place résolument du côté des écrivants, de ceux dont l’écriture est transitive. Je veux dire du côté de ceux dont l’écriture est destinée à désigner, montrer, manifester hors d’elle-même quelque chose qui, sans elle, serait restée sinon cachée, du moins invisible. 8 À lire de près cet entretien si important pour la réflexion de Foucault sur l’écriture et sa propre approche d’historien-philosophe, on relève néanmoins, avec étonnement, certains énoncés que l’on pourrait qualifier presque de ‚dérive‘, où Foucault semble se laisser entraîner à des positions qu’il refusait initialement. Après avoir affirmé avec insistance, en répétant la phrase „Je ne suis pas un écrivain“, 9 il ajoute, au détour d’une phrase et à la toute fin d’un paragraphe où il avait soutenu d’abord le contraire: „C’est peut-être là qu’existe, malgré tout, pour moi, un enchantement de l’écriture.“ 10 À d’autres endroits de l’entretien, il admet son „envie d’écrire“, 11 longtemps réprimée car considérée avec un certain dédain dans son milieu familial, et même son „plaisir d’écrire“. 12 Et dans un passage de l’entretien qui porte sur la question de savoir quand Foucault avait commencé à écrire, il évoque ce qu’il appelle sa ‚conversion‘ difficile vers l’écriture dans un milieu familial imprégné par la médecine et la chirurgie où la pratique de la parole et de l’écriture, au niveau professionnel, est réduite au strict minimum. Foucault se laisse alors entraîner à comparer sa propre écriture à du „velours“, ce qui semble, sur le plan métaphorique, radicalement opposé à l’idée du diagnostic et du regard clinique par lesquels il caractérise par ailleurs sa pratique d’historien-philosophe: „Pour moi, écrire est une activité extrêmement douce, feutrée. J’ai comme une impression de velours quand j’écris. Pour moi, l’idée d’une écriture veloutée est comme un thème familier, à la limite de l’affectif et du perceptif, qui ne cesse de 284 AArts & Lettres hanter mon projet d’écriture lorsque je suis en train d’écrire, qui me permet à chaque instant de choisir les expressions que je veux utiliser. Le velouté, pour mon écriture, est une sorte d’impression normative.“ 13 II. Archéologie sémantique du beau Essayons ici dans un premier temps, afin de mieux explorer les implications de ce paradoxe, de repérer les occurrences des termes de ‚beau‘ et de ‚beauté‘ dans l’œuvre de Foucault, puis d’analyser leur présence, leurs enjeux et leurs fonctions. Il faut d’emblée souligner la rareté de ces deux termes chez Foucault: ils ne figurent pas dans l’index des vastes recueils de ses articles et entretiens, Dits et écrits; et ils ne se trouvent dans un aucun titre d’ouvrage, d’entretien ou d’article publié par Foucault, mis à part celui, paru de manière posthume et dont le titre ne provient pas de Foucault lui-même, intitulé Le beau danger qui comporte le long entretien précédemment cité avec Claude Bonnefoy. Foucault utilise cependant cette expression vers la fin de cet entretien en lui donnant toutefois une signification non pas esthétique, mais herméneutique: „Je sais de toute façon“, précise Foucault, „que mes livres seront compromis par ce que je dis, et moi aussi. C’est le beau danger, le danger amusant de ces entretiens.“ 14 Les termes de ‚beau‘ et de ‚beauté‘ sont, effectivement, très rares chez Foucault qui les utilise essentiellement dans certains articles et entretiens consacrés à des œuvres artistiques et littéraires, mais aussi dans ses travaux sur des figures de criminels. Dans une interview consacrée à son ouvrage sur l’écrivain Raymond Roussel, il parle ainsi de la „belle étrangeté“ et de la „beauté intrinsèque“ de son œuvre. 15 Dans sa présentation du mémoire de l’assassin Pierre Rivière, il décrit celui-ci comme „un texte d’une grande étrangeté“ dont la „beauté seule suffirait encore à le protéger aujourd’hui.“ 16 Et dans son article programmatique sur „La vie des hommes infâmes“, basé sur des récits de prisonniers, il évoque d’emblée la „beauté“ du „style classique“ de certains de ces textes en ancrant ce terme de beauté dans un champ conceptuel constitué à partir des termes d’‚étrangeté‘, de ‚splendeur‘, d’‚intensité‘, de ‚violence‘, d’‚excès‘ et de ‚somptuosité‘. 17 Dans un entretien donné en 1975, dans le contexte de la parution de son ouvrage Surveiller et punir. Naissance de la prison, Foucault évoque l’esthétisation du crime caractéristique, selon lui, de la société bourgeoise moderne, qui aurait constitué une „esthétique où le crime n’est plus populaire, mais un des beaux-arts dont elle est seule capable.“ 18 Foucault reprend cette sémantique dans d’autres interviews de l’époque, en affirmant par exemple dans la fameuse émission „Radioscopie“ avec Jacques Chancel en 1975: Il me semble qu’il y a eu depuis le début du XIX e siècle toute une littérature que j’appellerais comme cela hâtivement bourgeoise, d’éloge du crime, une sorte d’esthétique du crime, l’assassinat considéré comme l’un des beaux-arts. 19 285 AArts & Lettres De l’analyse des occurrences des termes de ‚beau‘ et de ‚beauté‘ ainsi que de celui, étroitement relié, d’‚esthétique‘ dans l’œuvre de Foucault se dégage, malgré leur rareté relative, plusieurs lignes de force. Ces termes paraissent d’abord associés, notamment dans ses ouvrages parus dans les années 1960, à une esthétique de la provocation, de la rupture et de mise en cause radicale de paradigmes de savoirs et de représentations incarnés en premier lieu par des œuvres comme celles de René Magritte, du Marquis de Sade, d’Antonin Artaud, de Georges Bataille, de Jorge Luis Borges, de Raymond Roussel ou encore de Maurice Blanchot. Cette esthétique se situe d’emblée dans le sillage de la revue Tel Quel dans laquelle Foucault publia certains de ses textes. Dans un deuxième volet, élaboré notamment dans les années 1970 autour de Surveiller et punir et de son ouvrage sur Pierre Rivière, volet qui s’articule à son projet d’une archéologie des savoirs, les notions de beau, de beauté et la conception esthétique les définissant, renvoient avant tout au ‚crime‘ et à l’univers d’une marginalité rejetée par les normes établies de la société bourgeoise. Dans une interview donnée en 1978, il explique à ce sujet que la seule question qui m’intéresse est celle de savoir comment, depuis la fin du XVIII e siècle jusqu’à nos jours, il a été et il est toujours possible de relier la folie au génie, à la beauté, à l’art. Pourquoi avons-nous cette singulière idée que si quelqu’un est un grand artiste, alors il y a nécessairement en lui quelque chose qui relève de la folie? Nous pourrions dire la même chose du crime. Lorsque quelqu’un commet quelque chose comme un beau crime, les gens ne pensent pas que ce crime puisse être le fait d’une sorte de génie, mais qu’il y a de la folie à l’œuvre. Le rapport entre la folie et le crime, la beauté et l’art est très énigmatique. Notre tâche, selon moi, est de comprendre pourquoi nous considérons ces rapports comme allant de soi. 20 Le phénomène d’une ‚beauté du crime‘ apparaît ainsi, dans le cadre d’une archéologie foucaldienne des savoirs, à la fois comme un objet d’analyse discursive - puisque Foucault analyse notamment dans Surveiller et punir la généalogie des formes de représentation de la criminalité aux XVIII e et XIX e siècles - et comme un objet de fascination qui semble parfois même le capter. Foucault a en effet recours, quand il évoque les terme de ‚beau‘, de ‚beauté‘ et de ‚beaux-arts‘ en relation avec ceux de ‚crime‘ et de ‚folie‘, à des registres de description qui trahissent tout son enthousiasme et sa propre fascination devant ces phénomènes. La troisième dimension du champ sémantique de la ‚beauté‘ apparaît à la fin des années 1970, dans le sillage de son Histoire de la sexualité; elle est ancrée dans une „esthétique de l’existence“ plus large qui puise ses références en tout premier lieu dans la philosophie des stoïciens anciens. Elle semble en même temps proche des positions esthétiques et existentielles des surréalistes, en particulier de l’œuvre d’André Breton. Des ouvrages comme en particulier Arcane 17 et son roman Nadja qui se termine sur la fameuse phrase „La beauté sera CONVUL- SIVE ou ne sera pas“, 21 placent précisément en leur centre l’esthétisation de l’existence quotidienne, son potentiel révolutionnaire et la mise en cause radicale des distances traditionnellement établies entre ‚vie‘, ‚œuvre d’art‘ et ‚beauté‘. Dans 286 AArts & Lettres ses derniers ouvrages, notamment les deuxième et troisième volumes de son Histoire de la Sexualité, et dans les entretiens qui entourèrent leur parution dans les années 1982 et 1983, Foucault a ainsi fait glisser son utilisation des termes ‚beauté‘ et ‚esthétique‘ vers une approche qu’il a lui-même définie comme une ‚esthétique de l’existence‘ impliquant une véritable philosophie généalogique de l’existence. Il choisit de penser cette philosophie à partir des notions de ‚généalogie du désir‘, de ‚généalogie de l’éthique‘ et la définit comme une „ontologie de nous-mêmes dans nos rapports à la vérité qui nous permet de nous constituer en sujets de connaissance“, 22 prenant ainsi radicalement ses distances par rapport à la philosophie existentialiste de Sartre. Plutôt que de considérer l’art - et la conception de la beauté qui lui est inhérente dans la critique littéraire et artistique - comme un champ d’investigation et un domaine matériel (lié à des objets) et cloisonné, il propose de l’ancrer dans l’existence individuelle et sociale de chacun. „Dans notre société“, souligne Foucault dans une conférence donnée à l’Université de Californie à Berkeley en avril 1983, „l’art est devenu quelque chose qui n’est en rapport qu’avec les objets et non pas avec les individus ou avec la vie; l’art est un domaine spécialisé fait par des experts qui sont des artistes. Mais la vie de tout individu ne pourrait-elle pas être une œuvre d’art? “ 23 Ses tout derniers ouvrages, L’usage des plaisirs et Le souci de soi s’inscrivent ainsi dans une préoccupation croissante de Foucault pour la dimension esthétique de l’existence dans laquelle il voit une caractéristique de la post-modernité: „Je ne fais pas de différence“, déclare-t-il dans une interview avec le metteur en scène allemand Werner Schroeter, auteur du film La Mort de Maria Maliban („Der Tod der Maria Maliban“, 1972) auquel Foucault consacra un article paru en 1975 dans la revue Cinématographe, „entre les gens qui font de leur existence une œuvre et ceux qui font une œuvre dans leur existence. Une existence peut être une œuvre parfaite et sublime, et ça, les Grecs le savaient, alors que nous l’avons complètement oublié, surtout depuis la Renaissance.“ 24 Au-delà de ces dimensions multiples du champ sémantique de la beauté chez Foucault qui renvoient à des périodes de son œuvre, à des questionnements, des approches et des références tous très différents, on peut dégager deux lignes de continuité apparentes. On retiendra d’une part l’association du ‚beau‘ avec la notion d’‚étrangeté‘, c’est-à-dire la perception d’une opacité intrinsèque, d’une dimension insaisissable liée à l’esthétique; et, d’autre part, l’association entre beauté et émotionalité, Foucault reliant ces termes, dans presque toutes les occurrences des notions de ‚beau‘ et de ‚beauté‘ que l’on trouve dans ses textes, à l’affection, à l’envoûtement, à la séduction, à l’obsession ou encore à la fascination - des termes qu’il utilise intensément par exemple dans un entretien sur ses rapports avec l’œuvre littéraire de Raymond Roussel. „J’ai été envoûté par cette prose“, avoue-t-il en 1983 à Charles Ruas, „à qui j’ai trouvé une beauté intrinsèque, avant même de savoir ce qu’il y avait derrière. Et quand j’ai découvert les procédés et les techniques d’écriture de Raymond Roussel, sans doute un certain côté obsessionnel en moi a été une seconde fois séduit.“ 25 287 AArts & Lettres III. Fascinations esthétiques - approches des pratiques artistiques Foucault a toujours délibérément récusé la qualification de critique littéraire, de critique de cinéma ou de critique d’art, et pourtant, l’art, le cinéma et la littérature jouent un rôle non négligeable dans son œuvre, et ce dans une double perspective: épistémologique et esthétique. Dans la conception foucaldienne d’une archéologie du savoir - à travers laquelle il donna en 1969, dans l’ouvrage du même titre, un cadre théorique tant à ses livres antérieurs sur les discours sur la folie, la psychiatrie et l’histoire des sciences humaines, qu’à ses livres postérieurs sur les discours sur la criminalité et la sexualité -, des socles épistémologiques et des ruptures épistémologiques s’articulent, se cristallisent, dans des œuvres artistiques et des pratiques esthétiques. Les formes de représentation de l’âge classique, les rapports fondamentaux inscrits dans sa pensée et ses registres de perception de la réalité socio-politique, se trouvent ainsi cristallisés, selon Foucault dans Les mots et les choses (1966), au sein du tableau Las Meninas peint par Velázquez en 1656. La rupture entre l’âge classique et la première modernité se trouvé incarnée, dans la pensée foucaldienne, à travers les œuvres quasi contemporaines du Marquis de Sade, de Denis Diderot et de Francisco de Goya. Et la seconde modernité, introduite sur le plan de la pensée économique et sociale, essentiellement par la pensée de Marx, de Freud et de Nietzsche, 26 se trouve symbolisée ou ‚traduite‘, au niveau des signes artistiques, en particulier par des artistes comme Édouard Manet, Antonin Artaud et René Magritte auxquels Foucault consacra des pages entières dans Les mots et les choses et dans d’autres études. Foucault est qualifié très justement d’„artiste anti-artiste“ par la philosophe Blandine Kriegel, sachant magistralement faire „émerger dans une esthétique pure, l’objet distillé et retaillé de la pensée discursive.“ 27 Une analyse du fameux texte consacré aux Meninas de Velázquez dans Les mots et les choses permet de mettre en lumière cette approche épistémologique originale de Foucault et de montrer en même temps comment celle-ci se complète d’une approche à peine avouée, ou plutôt une fascination, d’ordre foncièrement esthétique. Le tableau du peintre officiel de la cour, peint à l’apogée de la puissance espagnole au milieu du XVII e siècle, représente les demoiselles d’honneur de la Cour du Roi d’Espagne, Philippe IV. Ce tableau occupe d’abord, dans la structure argumentative du livre de Foucault, la place d’un „modèle réduit de l’agencement du savoir classique, ce savoir rivé à la notion de Représentation et s’ordonnant à la forme d’un tableau“. 28 Foucault décrit tout d’abord minutieusement, au début de Les mots et les choses, ce tableau qu’il avait découvert lors d’une visite au Musée du Prado à Madrid, au début des années 1960. Se mettant lui-même à la place - ou plus précisément dans la position - du spectateur, il parcourt l’espace pictural en traçant la ligne classique du ‚Z‘ censée suivre son regard. Transformant par là même son lecteur en véritable spectateur du tableau dont il guide le regard, Foucault impose d’emblée la subjectivité de son discourscommentaire - par le recours délibéré au ‚je‘ - et met en même temps en place 288 AArts & Lettres une situation de communication intersubjective, par le recours au ‚nous‘, qui embrasse l’auteur-commentateur, le lecteur et le tableau à travers un jeu complexe de regards: La lumière, en inondant la scène (je veux dire aussi bien la pièce que la toile, la pièce représentée sur la toile, et la pièce où la toile est placée), enveloppe les personnages et les spectateurs et les emporte, sous le regard du peintre, vers le lieu où son pinceau va les représenter. Mais ce lieu nous est dérobé. Nous nous regardons regardés par le peintre, et rendus visibles à ses yeux par la même lumière qui nous le fait voir. Et au moment où nous allons nous saisir transcrits par sa main comme dans un miroir, nous ne pourrons surprendre de celui-ci que l’envers morne. L’autre côté d’une psyché. Or, exactement en face des spectateurs - de nous-mêmes -, sur le mur qui constitue le fond de la pièce, l’auteur a représenté une série de tableaux; et voilà que parmi toutes ces toiles suspendues, l’une d’entre elles brille d’un éclat singulier. 29 Le tableau qui montre par jeu de miroirs, au sens propre et au sens figuré du terme, le couple souverain, le Roi Philippe IV et son épouse Marianna, est ainsi structuré par trois perspectives habilement mises en lumière dans l’analyse de Foucault: d’abord le regard du modèle au moment même où on le peint, puis celui du spectateur qui regarde la scène, et, enfin, le regard du peintre (qui représente lui-même un autoportrait de Velázquez) à l’instant même où il compose son tableau. Foucault voit réunis dans ce tableau l’ensemble des éléments majeurs, articulés à travers une cristallisation visuelle, de ce qu’il définit dans Les mots et les choses comme l’épistémè classique: la transparence du réel, susceptible d’être rendu visible à travers des représentations picturales, et la place centrale du pouvoir souverain, à la fois caché et omniprésent, dans les réalités socio-politiques de même que dans les structures du savoir et dans les mentalités. „Peut-être y a-t-il dans ce tableau de Vélasquez“, écrit Foucault en conclusion de sa description analytique, „comme la représentation de la représentation classique, et la définition de l’espace qu’elle ouvre. Elle entreprend en effet de s’y représenter en tous ses éléments, avec ses images, les regards auxquels elle s’offre, les visages qu’elle rend visibles, les gestes qui la font naître.“ 30 Élément essentiel de la structure d’argumentation de Les mots et les choses que Foucault va reprendre au fil de son livre, le tableau de Velázquez apparaît en même temps comme un objet esthétique, caractérisé par une composition parfaite dans ses jeux de renvois et ses effets de miroir, devant lequel Foucault exprime toute sa fascination. Dans l’entretien de 1968 avec Claude Bonnefoy, que nous avons évoqué au début de cette contribution, Foucault a longuement décrit sa rencontre - d’abord purement émotionnelle et portée par une admiration d’ordre esthétique - avec le tableau de Velázquez au musée du Prado, qui a débouché ensuite, à travers un lent cheminement dont il esquisse la dynamique créative, sur une analyse épistémologique: Par exemple, un jour, à Madrid, j’avais été fasciné par Les Ménines de Velázquez. J’avais regardé ce tableau pendant très longtemps, comme ça, sans penser en parler un jour, 289 AArts & Lettres encore moins le décrire - ce qui m’aurait semblé sur le moment dérisoire et ridicule. Et puis un jour, je ne sais plus comment, sans l’avoir revu, sans même avoir regardé de reproduction, l’envie m’est venue de parler de mémoire de ce tableau, de décrire ce qu’il y avait dedans. Dès que j’ai essayé de le décrire, une certaine coloration du langage, un certain rythme, une certaine forme d’analyse surtout m’ont donné l’impression, la quasi certitude - fausse, peut-être - que j’avais exactement là le discours à travers lequel pourrait surgir et se mesurer la distance que nous avons à la pensée classique de l’ordre et de la ressemblance. C’est ainsi que j’ai commencé à écrire Les mots et les choses. 31 Foucault décrit ainsi, de manière assez surprenante, un cheminement de la connaissance qui s’ancre dans une expérience d’abord purement esthétique pour évoluer ensuite vers une analyse discursive à la fois historique et abstraite. Les termes, visant à saisir l’effet esthétique, de „coloration“, de „rythme“, de „regard“, de „fasciné“ et d’„envie“, se retrouvent, en partie articulés dans d’autres lexèmes, dans les textes descriptifs et analytiques que Foucault a consacrés dans Les mots et les choses à ce même tableau de Velázquez qui sont eux aussi empreints, comme nous l’avons vu, mais de manière peut-être moins perceptible, d’une subjectivité avouée. Foucault souhaite ainsi, utilisant une métaphore fascinante au début de Les mots et les choses, que le spectateur puisse „jouir du fruit, mûr tout à coup, de son spectacle“. 32 La „lumière dorée“, savamment agencée et occupant une place centrale dans le tableau, se transforme sous la plume de Foucault en un personnage allégorique qui „emporte à la fois le spectateur vers le peintre, et le modèle vers la toile, et en éclairant le peintre, le rend visible au spectateur et fait briller comme autant de lignes d’or aux yeux du modèle le cadre de la toile énigmatique où son image, transportée, va se trouver enclose“. 33 Par la suite, en suivant l’argumentation ici toute métaphorique de Foucault, cette lumière „enveloppe les personnages et les spectateurs et les emporte, sous le regard du peintre, vers le lieu où son pinceau va les représenter“. 34 Foucault fait également appel à l’imagination créative du lecteur-spectateur en insinuant que l’on „devine déjà dans le regard respectueux de l’assistance, dans l’étonnement de l’enfant et des nains“ 35 que les personnages apparaissant dans l’escalier lumineux au fond du tableau sont les souverains espagnols. Foucault a recours à un vocabulaire de description à la fois subtilement différencié et extrêmement poétique, permettant de saisir en même temps les connotations des signes du tableau, et son propre plaisir, sa fascination personnelle devant ce tableau qu’il évoque à la fin de ses réflexions sur les Ménines dans Les mots et les choses en parlant du „pur bonheur de l’image“. 36 On peut relever ainsi des termes évocateurs et poétiques comme „jour étrange“, „énigmatique“, „nuit sans profondeur“, „scintiller“, „enchantement“ (terme qui revient deux fois) ou encore „ligne impérieuse“, et des métaphores comme „l’acier du regard“, 37 „la fixité opaque“, 38 „l’envers morne“ (du miroir), 39 „le balancement immobile“ 40 ou le „miroir regardant et regardé“. 41 290 AArts & Lettres IV. Esthétique de l’existence Les derniers ouvrages de Foucault - les volumes deux et trois de son Histoire de la sexualité, intitulés respectivement L’usage des plaisirs et Le souci de soi (1984) - comportent un dernier volet esthétique que Foucault a défini lui-même comme une ‚esthétique de l’existence‘. Dans son approche généalogique du discours occidental sur la sexualité, il distingue en effet deux types de morale très différents: d’une part la morale chrétienne impliquant l’obéissance à un code et valorisant la pratique de l’aveu et de la confession (du confessionnal chrétien jusqu’à la psychanalyse), d’autre part l’éthique gréco-romaine orientée vers l’esthétique et „pour laquelle il s’agit de faire de sa vie une œuvre d’art “. 42 Revenant ainsi à la problématique de l’‚invention de soi‘ qui avait été au centre de Raymond Roussel (1963), un de ses premiers ouvrages et le seul concernant directement la littérature, Foucault associe, dans les derniers volumes de l’Histoire de la sexualité et les articles ou entretiens qui les accompagnent, éthique et esthétique d’une manière nouvelle et originale, en ayant recours notamment à des philosophes de l’antiquité grecque: „Et si je me suis intéressé à l’Antiquité“, remarque-t-il dans un de ses tout derniers entretiens, paru après sa mort en juillet 1984 dans Le Monde, „c’est que, pour toute une série de raisons, l’idée d’une morale comme obéissance à un code de règles est en train, maintenant, de disparaître, a déjà disparu. Et à cette absence de morale répond, doit répondre, une recherche qui est celle d’une esthétique de l’existence.“ 43 Quant au fondement d’une généalogie historique du discours occidental sur la sexualité, à la fois sur sa répression et son omniprésence discursive, Foucault met en avant, dans ses derniers ouvrages, quatre pratiques de soi qu’il considère comme les composantes d’une ‚esthétique de l’existence‘: l’entraînement (gumnasisa) englobant le sport, la sexualité, mais aussi la diététique; l’ascèse (askêsis) impliquant des exercices de concentration, de retraite, de purification, d’épreuve de soi-même; ensuite, en troisième lieu, la méditation (meletê) embrassant les techniques de mémorisation des faits passés, mais aussi des rêves et de leur interprétation; et, enfin, en quatrième lieu, l’examen de soi impliquant des pratiques d’introspection, d’observation de soi, où l’écriture joue un rôle capital et pour lesquelles Foucault renoue avec la pensée philosophique d’Epictète, de Cicéron et de Marc-Aurèle. Cette valorisation des pratiques d’introspection alla de pair, dans les derniers ouvrages et articles de Foucault, avec une réflexion sur Immanuel Kant et son impératif moral - concept auquel Foucault choisit de donner un sens radicalement nouveau, individualiste et non-téléologique - et avec un retour sur une certaine conception de l’esthétique: non plus celle, sadienne ou rimbaldienne, de l’excès, de la beauté du crime et du lyrisme de la violence qui avait été au centre de la réflexion esthétique de Foucault entre la fin des années 1960 et celle des années 1970, mais au contraire celle d’une stylisation de l’existence individuelle, d’un accord entre pratiques de soi et expression de soi-même, qui accompagne le grand projet généalogique de l’Histoire de la sexualité à partir de 1976. Foucault qui semblait être devenu, dans 291 AArts & Lettres la mouvance de mai 68, le philosophe de la marginalité et des exclus, mais aussi de l’homosexualité et de la libération sexuelle, se fait le porte-parole, dans ses derniers ouvrages, d’une déconstruction critique des discours libertins contemporains en Occident, de leur diffusion pléthorique, de leur omniprésence et de leur commercialisation à outrance. Son projet d’une ‚esthétique de l’existence‘, qui s’ancre en tout premier lieu dans le sillage des philosophes de l’Antiquité, renvoie en même temps, outre à Raymond Roussel, à André Breton et sa vision d’une unité existentielle entre art et vie, dont on trouve l’une des expressions les plus marquantes dans son roman Nadja, et prend résolument ses distances par rapport à l’existentialisme sartrien. Foucault précise dans un entretien en 1983 à ce sujet: À mon avis, la seule conséquence pratique et acceptable de ce que Sartre a dit consiste à relier la découverte théorique à la pratique créatrice et non plus à l’idée d’authenticité. Je pense qu’il n’y a qu’un seul débouché pratique à cette idée du soi qui n’est pas donné d’avance: nous devons faire de nous-mêmes une œuvre d’art. Dans ses analyses sur Baudelaire, Flaubert etc., il est intéressant de voir que Sartre renvoie le travail créateur à un certain rapport à soi - l’auteur à lui-même - qui prend la forme de l’authenticité ou de l’inauthenticité. Moi je voudrais dire exactement l’inverse: nous ne devrions pas lier l’activité créatrice d’un individu au rapport qu’il entretient avec lui-même, mais lier ce type de rapport à soi que l’on peut avoir à une activité créatrice. 44 Comme chez André Breton, Friedrich Nietzsche, 45 Raymond Roussel ou encore chez Charles Baudelaire - qui sont des références importantes du premier et du dernier Foucault -, l’association entre une nouvelle forme d’éthique individualiste et non-conformiste et une esthétique de la stylisation de soi qui a délibérément recours aux registres de beauté de l’avant-garde implique une attitude fondamentale et radicale de résistance: une résistance aux modes de pensée, aux idéologies, aux discours dominants, et une résistance aux formes de la culture de masse moderne avec leurs fausses promesses de libération et d’épanouissement individuel. À plusieurs niveaux - au niveau de la fascination affective, à travers le projet d’une archéologie du savoir et, enfin, dans ses dernières œuvres, au sein d’une conception esthétique de la vie - Foucault, qui avait longtemps catégoriquement nié son talent d’écrivain et refusé les désignations d’‚artiste‘ et de ‚critique littéraire‘, semble avoir admis l’imbrication intrinsèque entre art et science, entre analyse des formations discursives et pratiques esthétiques. „Cette espèce de grande coupure qu’il y avait entre le savoir et l’art est quand même en train de disparaître“, 46 affirmait Foucault dès 1976 dans un entretien donné sur son ouvrage sur Pierre Rivière et le film que René Allio lui consacra par la suite. Foucault a esthétisé son écriture par le recours à des termes poétiques et des métaphores puissantes, 47 comme celle du visage dans le sable qui s’efface lentement, signifiant la mort de l’homme dans la pensée occidentale moderne; par l’usage de structures rhétoriques comme le dialogue fictif (à l’exemple du texte Rousseau, juge de Jean- Jacques que Foucault a commenté), l’allitération et l’antithèse; et, enfin, par la place importante qu’il accorda dans son œuvre à l’art et aux pratiques esthétiques 292 AArts & Lettres sous leurs différentes formes: non pas à l’art tout court, mais à un certain canon esthétique imprégné par la modernité baudelairienne, rimbaldienne et surréaliste; par un goût délibéré pour les dimensions esthétiques de la perversion, la beauté du crime et le „lyrisme de la violence“ 48 qui le rapprochent à cet égard des conceptions esthétiques de Jean Genet, et par une volonté, très prononcée surtout dans ses tout derniers ouvrages, de relier l’art et la vie, l’existence et la stylisation esthétique de soi-même. Cette esthétique de la contradiction, du contre-discours et de la résistance, voire de la provocation qui caractérise son œuvre, est ancrée dans une profonde fascination pour les bibliothèques et pour ce qui constitue pour lui la ‚beauté des archives‘, avec leurs discours refoulés et leur sourde matérialité: „Ces archives“, écrit Foucault en 1977, „ont secoué en moi plus de fibres que ce que l’on appelle d’ordinaire la littérature, sans que je puisse dire aujourd’hui encore si m’a ému davantage la beauté de ce style classique, drapé en quelques phrases autour de personnages sans doute misérables, ou les excès, le mélange d’obstination sombre et de scélératesse de ces vies dont on sent, sous des mots lisses comme la pierre, la déroute et l’acharnement.“ 49 1 L’auteur de cette contribution tient à rendre hommage à la mémoire du fascinant chercheur et enseignant que fut Michel Foucault, décédé il y a trente ans. Il a eu l’occasion - et le grand bonheur - d’assister à ses cours au Collège de France entre 1977 et 1979. Ce texte constitue une version remaniée et élargie d’une conférence présentée lors du colloque „Beauté et abstraction“ organisé par le professeur Jean-Marc Narbonne (Université Laval, Québec, Département de Philosophie) dans le cadre des ‚Rencontres de Percé‘ à Percé (Québec, Canada). 2 Michel Foucault, Le beau danger. Entretien avec Claude Bonnefoy (1968), Paris, Éditions de l’École des Hautes Études en Sciences Sociales, 2011 (Coll. Autographe), 47. 3 Ibid., 27. 4 Ibid., 28 5 Ibid. 6 Ibid., 41. Bonnefoy mentionne également le „regard clinique, neutre“ de Foucault (ibid., 38). 7 Ibid., 41. 8 Ibid., 59sq. 9 Ibid., 59 en bas, 60 en haut. 10 Ibid., 60. 11 Ibid., 31. 12 Ibid. 13 Ibid., 35. 14 Ibid., 66. 15 Michel Foucault, „Archéologie d’une passion“. Propos recueillis par Charles Ruas, in: Magazine littéraire, 221, juillet-août 1985, 100-105, ici 101sq. 16 Michel Foucault, Moi. Pierre Rivière, ayant égorgé ma mère, ma sœur et mon frère Un cas de parricide au XIX e siècle, Paris, Gallimard, 1973 (Coll. Archives), 2. 17 Michel Foucault, „La vie des hommes infâmes“, in: Les Cahiers du Chemin, 29, janvier 1977, 12-29, ici 13, 19, 25. 293 AArts & Lettres 18 Michel Foucault, „Entretien sur la prison: le livre et la méthode“. Entretien avec Jean- Jacques Brochier, in: Le Magazine littéraire, 101, juin 1975, 27-33, reproduit in: Michel Foucault, Dits et écrits, t. II, Paris, Gallimard, 1995, 740-753, ici 747. 19 Michel Foucault, „Radioscopie“. Avec Jacques Chancel (10 mars 1975), Paris, Éditions Radio France, 3 octobre 1975, 1-14, reproduit in: Foucault, Dits et écrits, t. II, 783-802, ici 797. 20 Michel Foucault, „Dialogue sur le pouvoir“. Entretien avec des étudiants de Los Angeles (1975), in: id., Dits et écrits, t. III, 464-477, ici 475. 21 André Breton, Nadja, édition entièrement revue par l’auteur, Paris, Gallimard, 1982 (Coll. Le Livre de poche), 187. 22 Michel Foucault, „À propos de la généalogie de l’éthique: un aperçu du travail en cours (avril 1983)“, in: id., Dits et écrits, t. IV, 383-397, ici 393. 23 Ibid., 392. 24 Michel Foucault, cité d’après Patrice Maniglier / Dork Zabunyan, Foucault va au cinéma, Paris, Fayard, 2011, 19. 25 Foucault, „Archéologie d’une passion“ (note 15), 101. 26 Voir Hans-Jürgen Lüsebrink, „‚Généalogie de la morale‘ als Form von Geschichtsschreibung. Zur Rezeption Nietzsches im Werk Michel Foucaults“, in: Walter Gebhard (ed.), Friedrich Nietzsche. Strukturen der Negativität, Bayreuther Nietzsche-Kolloquium 1982, Berne / Francfort-sur-le-Main / New York, Lang, 1984, 157-181. 27 Blandine Kriegel, Michel Foucault aujourd’hui, Paris, Plon, 2004, 50. 28 Thomas Bolmain, „Pratique archéologique, esthétique picturale et temporalité historique chez Foucault“, in: Sens [public]. Revue web, 8 janvier 2010, www.sens-public.org/ spip.php? article720&lang=fr (13/ 09/ 14), 1-14, ici 5. 29 Michel Foucault, Les mots et les choses. Une archéologie des sciences humaines, Paris, Gallimard, 1966 (Coll. Bibliothèque des Histoires), 22. 30 Ibid., 31. 31 Foucault / Bonnefoy, Le beau danger (note 2), 67. 32 Foucault, Les mots et les choses (note 29), 23. 33 Ibid., 21sq. 34 Ibid., 22. 35 Ibid., 23 . 36 Ibid., 31. 37 Ibid., 19. 38 Ibid., 21. 39 Ibid., 22. 40 Ibid., 26. 41 Ibid., 29. 42 Judith Revel, Le vocabulaire de Foucault, Paris, Ellipses, 2002 (Coll. Édition Marketing), art. „Esthétique (de l’existence)“, 27sq., ici 27. 43 Michel Foucault, „Une esthétique de l’existence“, in: Le Monde, 15-16 juillet 1984, réédité in: Foucault, Dits et écrits, t. IV, 730-735. 44 Michel Foucault, „À propos de la généalogie de l’éthique: un aperçu du travail en cours“ (Conversation à Berkeley en 1983), in: Foucault, Dits et écrits, t. IV, 383-393, ici 392sq. 45 Cf. ibid., 393, où Foucault répond à la remarque de ses interlocuteurs H. Dreyfus et P. Rabinow: „- Cela fait penser à cette remarque de Nietzsche dans Le Gai Savoir (§ 290), qui dit qu’il faut donner du style à sa vie ‚au prix d’un patient exercice et d’un travail quotidien‘. - Oui. Mon point de vue est plus proche de Nietzsche que de Sartre.“ 294 AArts & Lettres 46 Michel Foucault, „Le retour de Pierre Rivière“. Entretien avec G. Gauthier, in: La Revue du cinéma, 312, décembre 1976, 37-42, réédité in: Foucault, Dits et Écrits, t. III, 114-123, ici 122. 47 Cf. sur ce sujet Hans-Jürgen Lüsebrink, „Über Bilder und Metaphernnetze in den Schrifttexten Michel Foucaults“, in: Klaus Dirscherl (ed.), Bild und Text im Dialog, Passau, Wissenschaftsverlag Rothe, 1993, 467-487 et id., „Postface“, in: Frances Fortier, Les Stratégies textuelles de Michel Foucault. Un enjeu de véridiction, Québec, Nuit Blanche, 1997, 315-318. 48 Michel Foucault, „Entretien“. Avec P. Kané, in: Cahiers du Cinéma, 271, novembre 1976, 52-53, réédité in: Foucault, Dits et écrits, t. III, 97-101, ici 101. 49 Foucault, „Vie des hommes infâmes“ (note 17), 13.